Les 100 premiers jours de von der Leyen : ce qu’elle a promis, ce que ça implique et ce qu’elle va vraiment faire

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Depuis que le président américain Franklin D. Roosevelt a qualifié en 1933 ses “100 premiers jours” d’étape clé, les dirigeants du monde entier ont pris cette référence pour promettre des changements spectaculaires à leur électorat.

Maintenant, c’est au tour d’Ursula von der Leyen.

L’Allemande, qui a obtenu un nouveau mandat de présidente de la Commission européenne en juillet, s’est engagée à accomplir pas moins de sept exploits politiques au cours de ses 100 premiers jours. Elle avait d’ailleurs fait la même chose au début de son premier mandat (voici comment elle s’en était tirée).

Ses objectifs sont très variés : ils vont de l’ébauche d’une politique de défense remusclée à des entreprises d’intelligence artificielle surpuissantes, en passant par une nouvelle “vision” de l’agriculture qui aidera les agriculteurs à respecter les normes environnementales de l’Union européenne.

C’est un plan ambitieux à l’heure où l’UE traverse une période angoissante. Von der Leyen ne fait pas seulement face à une économie européenne au bord d’une “lente agonie”, selon l’expression de l’ancien président de la Banque centrale européenne Mario Draghi. Elle est également confrontée à la perspective de devoir assumer une part beaucoup plus importante de la guerre en Ukraine après l’élection présidentielle américaine en novembre ; sans parler du fait que l’Union est aux prises avec un nationalisme rampant.

Comment parviendra-t-elle à atteindre ses objectifs ? En tenant ses promesses ; ces prétendues merveilles politiques qui ne sont que de simples propositions législatives, ou “concepts de plans”, dirait Donald Trump.

Elle devra demander à son commissaire à la Défense nouvellement désigné, le Lituanien Andrius Kubilius, de réaliser un rapport sur le sujet. Celui à l’Agriculture, le Luxembourgeois Christophe Hansen, sera contraint de présenter un nouveau plan visant à réconcilier les agriculteurs avec les règles écologiques de l’UE.

Dans d’autres domaines, la tâche est un peu plus importante.

Dans la tech, son initiative “usines d’IA” vise à connecter les start-ups européennes à des supercalculateurs, afin qu’elles puissent commencer à rattraper leurs concurrents américains et chinois dans le secteur en plein essor de l’intelligence artificielle générative.

En ce qui concerne l’élargissement, ses fameuses revues de politique publique donneront une indication claire de la rapidité, ou de la lenteur, avec laquelle l’Union souhaite s’ouvrir à de nouveaux membres.

Elle devra demander à son nouveau commissaire à la Défense, le Lituanien Andrius Kubilius, de lui remettre un rapport sur la défense. | Lefteris Pitarakis via Getty Images
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Dans l’ensemble, faire en sorte que l’équipe de commissaires nouvellement constituée présente une série de textes pourrait s’avérer la partie la plus facile du second mandat de von der Leyen. Il sera beaucoup plus difficile de transformer ces premières ébauches en changements à long terme.

Pour vous donner une meilleure idée de ce à quoi il faut s’attendre, les journalistes experts de POLITICO ont passé au peigne fin les promesses et rendu leur jugement.

1. Un Pacte industrie propre

Ce que von der Leyen a dit : “Nous avons besoin d’un nouveau Pacte industrie propre pour des industries compétitives et des emplois de qualité dans les 100 premiers jours du mandat. Nous nous attacherons à soutenir et à créer les bonnes conditions pour nos entreprises afin d’atteindre nos objectifs communs. Cela signifie simplifier, investir et garantir l’accès à des approvisionnements énergétiques et à des matières premières bon marché, durables et sûrs.”

“Cela préparera le terrain pour atteindre l’objectif de réduction des émissions de 90% d’ici à 2040, que nous proposerons d’inscrire dans notre loi européenne sur le climat. A chaque étape, nous travaillerons en partenariat avec l’industrie, les partenaires sociaux et toutes les parties prenantes. Nous proposerons un Industrial Decarbonisation Accelerator Act, afin de soutenir les industries et les entreprises pendant la transition. Ce texte fléchera les investissements dans les infrastructures et l’industrie, en particulier dans les secteurs à forte intensité énergétique. Il soutiendra les marchés européens pour le développement, la production et la diffusion de technologies propres dans l’industrie. Il contribuera également à accélérer la planification et les procédures d’appel d’offres et d’octroi de permis.”

Qu’est-ce que ça veut dire ? Un premier pas vers la législation. Bien que l’on ne sache pas exactement ce que von der Leyen présentera, on s’attend à ce qu’elle donne un aperçu de la manière dont elle entend aider les entreprises européennes à gérer la transition vers une économie décarbonée et à rester à dans la course face à la forte concurrence des Etats-Unis et de la Chine, tout en poursuivant la mise en œuvre de son Pacte vert.

Pourquoi maintenant ? Le cœur industriel de l’Europe appelle à l’aide, affirmant qu’il est confronté à une crise existentielle dans un contexte de prix élevés de l’énergie, d’une avalanche de réglementations écologiques et d’une concurrence acharnée venant de l’extérieur. Cette analyse est largement soutenue par Mario Draghi dans son rapport tant vanté. Dans le même temps, la Commission est sous pression pour prouver que son Pacte vert est viable, alors qu’elle fait face à une forte résistance de la part des forces de droite et d’extrême droite à travers l’Union.

Quelles sont les batailles clés ? La plus grande bataille sera celle du financement. Selon les experts, verdir l’industrie, tout en maintenant sa compétitivité, nécessitera des centaines de milliards d’euros d’investissements. Mais les gouvernements de l’UE ne sont guère enclins à les dépenser. Le débat portera également sur la question de savoir s’il faut détricoter ou renforcer certaines des lois écologiques emblématiques de Bruxelles, notamment en ce qui concerne l’interdiction progressive des voitures à moteur thermique.

La probabilité que ça améliore la situation ? La Commission peut améliorer les perspectives des entreprises en optimisant certaines de ses règles, en poussant les capitales de l’UE à intégrer davantage leurs marchés de l’énergie et en promouvant les technologies innovantes. Mais sans euros supplémentaires dans la tirelire, il sera pratiquement impossible de relever le défi.

— Par Victor Jack

2. Un plan d’action européen pour renforcer la cybersécurité dans la santé

Ce que von der Leyen a dit : “Nous devons également faire davantage pour protéger la sécurité de nos systèmes de santé, qui sont de plus en plus la cible de cyberattaques et de ransomwares. Afin d’améliorer la détection des menaces, la préparation et la réponse aux crises, je proposerai un plan d’action européen sur la cybersécurité des hôpitaux et des services de soins dans les 100 premiers jours de mon mandat.”

Qu’est-ce que ça veut dire ? Pas une législation. Il faut s’attend à une proposition invitant les gouvernements, les industriels et les pouvoirs publics à mettre en place des mesures immédiates contre les ransomwares (rançongiciel ou logiciel de rançon en français) et autres cyberattaques. L’objectif pourrait être de renforcer rapidement la cybersécurité dans les hôpitaux, pendant que les travaux à plus long terme basés sur la directive NIS2 (une législation européenne sur la cybersécurité) se mettent en place.

La Commission est sous pression pour prouver que son Pacte vert est viable. | Wojtek Radwanski/Getty Images

Pourquoi maintenant ? Ces dernières années, les hôpitaux du monde entier ont fait l’objet de graves cyberattaques, en particulier de ransomwares — qui bloquent l’accès aux données de la cible jusqu’à ce qu’elle paie une rançon. Il n’est donc pas surprenant, étant donné le potentiel chaos qui peut-être provoqué, que les hôpitaux soient une cible privilégiée des hackers, généralement des groupes criminels.

Quelles sont les batailles clés ? Répartir les obligations : les hôpitaux publics à court d’argent ne disposeront probablement pas des ressources nécessaires pour mettre leurs systèmes en ordre, et les prestataires de soins de santé privés pourraient rechigner devant les coûts. Les acteurs de la cybersécurité s’étant plaints d’une série de règles et d’initiatives qui se chevauchent parfois, en rajouter pourrait ne pas être bien perçu. Au sein du Berlaymont, les commissaires désignés Henna Virkkunen et Olivér Várhelyi ont été chargés du projet.

La probabilité que ça améliore la situation ? La directive NIS2, actuellement mise en œuvre au niveau national dans l’ensemble de l’UE, vise déjà à protéger les secteurs critiques tels que la santé. On peut toutefois saluer que cette question soit remontée au plus haut niveau de la politique européenne.

— Par Sam Clark

3. Une initiative sur les usines d’IA

Ce que von der Leyen a dit : “Nous garantirons l’accès à de nouvelles capacités de supercalcul sur mesure pour les start-ups et l’industrie de l’IA par le biais d’une initiative sur les usines d’IA.”

Qu’est-ce que ça veut dire ? Pour entraîner des modèles d’IA, il faut beaucoup de puissance de calcul. L’UE souhaite relier les start-ups spécialisées dans l’IA à son réseau de superordinateurs financé par l’UE (et également réduire la dépendance à l’égard de la puissance de calcul des Etats-Unis).

Pourquoi maintenant ? Au cours de la dernière législature, la Commission et les eurodéputés ont accordé beaucoup d’attention à l’AI Act, la première législation contraignante au monde en matière d’intelligence artificielle, axée sur la gestion des risques liés à cette technologie. Cela a suscité des remarques selon lesquelles l’UE se préfère une fois de plus réguler la prochaine grande vague technologique plutôt que surfer dessus. C’est pourquoi von der Leyen a fait de l’“innovation en matière d’IA” une nouvelle expression à la mode afin de se défendre contre les critiques selon lesquelles l’UE ne fait que réglementer.

Quelles sont les batailles clés ? Il est peu probable que ce projet soit très controversé. L’initiative sur les usines d’IA fait partie d’un paquet que la Commission a présenté en janvier. Au début du mois de septembre, Bruxelles a déjà appelé à s’y mettre.

La probabilité que ça améliore la situation ? Cela pourrait être “trop peu, trop tard”. Certaines des entreprises européennes les plus prometteuses dans l’intelligence artificielle ont déjà fait équipe avec des géants américains de la tech, et ces partenariats portent notamment sur la puissance de calcul. La française Mistral a conclu un accord avec Microsoft en février pour entraîner sa technologie sur les superordinateurs de l’entreprise américaine.

— Par Pieter Haeck

4. Un livre blanc sur la défense

Ce que von der Leyen a dit : “Pour définir la nouvelle approche et identifier nos besoins d’investissement, nous présenterons conjointement un livre blanc sur l’avenir de la défense européenne au cours des 100 premiers jours du mandat. Le renforcement du partenariat UE-Otan sera au cœur de ce travail. Nous continuerons à étendre notre coopération avec l’Otan pour couvrir toutes les menaces, y compris les nouveaux dangers liés au cyber, aux hybrides ou à l’espace, et à renforcer notre partenariat transatlantique.”

Qu’est-ce que ça veut dire ? Le livre blanc n’est qu’un document de discussion et non un règlement. Son objectif est de lancer le débat sur comment stimuler la défense européenne, son industrie et les acquisitions conjointes. Il permettra non seulement aux dirigeants pour comprendre les possibles domaines d’accord et de coordination avec l’Otan, mais aussi à l’industrie de s’impliquer pleinement.

Pourquoi maintenant ? Parce que la défense sera un thème clé de la nouvelle législature. Von der Leyen a choisi un commissaire à la Défense qui devrait s’occuper principalement de la manière de stimuler l’industrie de la défense. L’idée est de partir du début : avoir un débat clivant sur une armée européenne n’a pas de sens si l’Union ne peut pas produire suffisamment de munitions ou de missiles.

La position de la France pourrait devenir plus vulnérable si Kamala Harris remporte les élections américaines. | Kevin Dietsch/Getty Images

Quelles sont les batailles clés ? La principale est le financement. Des pays comme la France et la Pologne ont fait pression pour émettre des titres de dette spécifique, une idée à laquelle l’Allemagne et les Pays-Bas s’opposent fermement. Selon des diplomates, la position de la France pourrait devenir plus fragile si Kamala Harris remporte les élections américaines, car cela pourrait renforcer le point de vue de ceux qui s’opposent à ces titres financiers, qui affirment que l’Europe n’a pas besoin de mettre en commun ses ressources pour acheter des armes. Mais il existe d’autres options, comme l’utilisation du budget de l’UE. D’autres questions se posent également, comme celle de savoir si l’argent doit aller uniquement aux entreprises de défense européennes.

La probabilité que ça améliore la situation ? Cela l’améliorera, car quel que soit le scénario — en cas de victoire de Kamala Harris ou même d’accord de paix soudain en Ukraine — l’intégration de la défense de l’UE devrait se poursuivre, car la menace russe ne disparaîtra pas et les Etats-Unis se concentreront davantage sur le Pacifique. “Le train a déjà quitté la gare”, résume un diplomate européen de haut rang, à qui l’on a garanti l’anonymat pour qu’il puisse s’exprimer librement, comme à d’autres dans cet article.

— par Jacopo Barigazzi

5. Une vision pour l’agriculture et l’alimentation

Ce que von der Leyen a dit : “J’ai convoqué un dialogue stratégique sur l’agriculture qui présentera bientôt son rapport. Sur la base de ces recommandations, je présenterai dans les 100 premiers jours une vision pour l’agriculture et l’alimentation qui examinera comment assurer la compétitivité et la durabilité à long terme de notre secteur agricole dans les limites de notre planète. A cet égard, il est essentiel que les agriculteurs disposent d’un revenu juste et suffisant. Ils ne doivent pas être contraints de vendre systématiquement leurs produits à des prix inférieurs aux coûts de production. Je défendrai toujours une politique européenne des revenus pour les agriculteurs européens et veillerai à ce que le budget de l’UE et notre politique agricole commune soient ciblés et trouvent le juste équilibre entre incitations, investissements et réglementation.”

Qu’est-ce que ça veut dire ? Au milieu d’une vague de manifestations de tracteurs en début d’année, la présidente de la Commission a convoqué 29 organisations ayant des intérêts dans le secteur agroalimentaire, et souvent des points de vue opposés, pour discuter. Elle s’est ensuite engagée à utiliser les conclusions — sous la forme d’un rapport de 100 pages contenant des recommandations — dans le cadre de sa vision sur l’avenir de l’agriculture européenne.

Pourquoi maintenant ? Les agriculteurs ont fait passé une période difficile à Von der Leyen vers la fin de son précédent mandat. Les nouvelles exigences environnementales et la législation européenne à venir du Pacte vert ne leur ont pas vraiment plu, alors que le secteur agricole se plaignait déjà de prix injustes et des accords commerciaux.

La probabilité que ça améliore la situation ? La question est maintenant de savoir si von der Leyen — et son prochain commissaire à l’Agriculture — parviendra à satisfaire toutes les personnes présentes autour de la table avec sa nouvelle vision. Selon une source européenne, certaines recommandations devraient être mieux accueillies que d’autres. En outre, il n’est pas certain que le secteur de l’alimentation et de l’agriculture dans son ensemble les soutiendra, car certains secteurs — notamment les groupes de protection des animaux et les lobbyistes de la viande — sont déjà furieux de ce document non contraignant destiné aux parties prenantes.

— Par Paula Andres-Richart

6. Des dialogues politiques avec les jeunes

Ce qu’elle a dit : “Je demanderai à tous les commissaires d’organiser leurs premiers dialogues politiques annuels avec la jeunesse dans les 100 premiers jours de leur mandat. Ces dialogues seront répétés chaque année. Je veux m’assurer que les jeunes puissent utiliser leur voix — leur propre voix — pour contribuer à façonner notre avenir.”

Qu’est-ce que ça veut dire ? Il s’agit d’une tentative de von der Leyen pour répondre aux appels de plus en plus insistants en faveur d’une plus grande participation des jeunes à l’élaboration des politiques de l’UE, y compris au plus haut niveau. Ces dialogues, dont le format exact reste à déterminer, permettent à l’Allemande de montrer qu’elle met tout son collège de commissaires au travail pour s’adresser aux jeunes. Il convient toutefois de noter qu’elle leur demande d’organiser un dialogue, et non de formuler des propositions politiques ou de ’engager à donner suite aux demandes des jeunes.

Pourquoi maintenant ? L’association Fit for Future Generations, qui rassemble un certain nombre de think tanks et d’ONG, a poussé la cheffe de l’exécutif européen à nommer un commissaire pour les générations futures — ce que von der Leyen est susceptible de faire en confiant au Maltais Glenn Micallef un portefeuille comprenant les mots “jeunesse” et “assurer l’équité intergénérationnelle”.

Pour Alberto Alemanno, qui est l’un des principaux défenseurs d’une plus grande représentation des jeunes, la démarche de von der Leyen est la bonne. “Pour la première fois, l’UE semble disposée à façonner l’agenda politique pour les jeunes”, se félicite-t-il. “Cela devient très tendance dans les pays européens, car les intérêts des jeunes et des enfants ont toujours été négligés dans le projet européen.” Alemanno salue le fait que von der Leyen semble vouloir institutionnaliser les dialogues, c’est-à-dire les rendre permanents.

La probabilité que ça améliore la situation ? Bof. Alemanno s’est montré sceptique quant à la probabilité que les dialogues débouchent sur des propositions politiques contraignantes. “Je ne suis pas très optimiste quant à la capacité de ces dialogues à faire progresser les intérêts des jeunes”, confie-t-il. “Je considère qu’il s’agit d’une approche préventive visant à créer un forum institutionnalisé où ces intérêts pourraient être cooptés.”

— Par Nick Vinocur

7. Révision de la politique d’élargissement

Ce que von der Leyen a dit : “Au cours des 100 premiers jours, nous présenterons nos revues de politique de pré-élargissement en nous concentrant sur des domaines particuliers tels que l’Etat de droit, le marché unique, la sécurité alimentaire, la défense et la sécurité, le climat et l’énergie et les migrations, ainsi que sur la convergence sociale, économique et territoriale de manière plus générale.”

Les agriculteurs ont fait passer une période difficile à Ursula von der Leyen lors de son précédent mandat. | Christophe Verhaegen/Getty Images

De quoi s’agit-il ? Alors que l’UE envisage de s’élargir en intégrant l’Ukraine et la Moldavie, von der Leyen demande aux principaux services de se prononcer sur les changements qu’ils devraient apporter pour entrer dans le club européen. La Commission a donné un aperçu de la situation en juillet, mais il est attendu que ces “revues de politiques publiques” soient plus détaillées.

Quelles sont les batailles clés ? Les aspects les plus controversés de l’élargissement concernent le marché unique, la politique agricole commune et les fonds de cohésion. Les voisins de l’Ukraine craignent que ses produits agricoles bon marché n’inondent leurs marchés, entraînant une baisse des prix et portant préjudice à leurs agriculteurs. D’autres pays membres craignent que l’adhésion de Kiev ne mette à rude épreuve les subventions agricoles et les fonds de cohésion régionaux de l’Union, en raison de la pauvreté relative de l’Ukraine par rapport à la plupart des pays de l’UE.

La probabilité que ça améliore la situation ? Von der Leyen et les dirigeants européens se sont engagés à mettre l’Ukraine et la Moldavie sur la voie de l’adhésion à l’UE. Après tout, les manifestations pro-UE à Kiev ont été à l’origine de la répression russe, qui a finalement conduit à l’invasion en février 2022. Mais l’envie de prendre des mesures concrètes en vue de l’adhésion de l’Ukraine — au-delà du signal politique donné à la fin de l’année dernière — se fait rare. De nombreux dirigeants européens ne sont pas d’humeur à envisager les profonds changements, internes comme externes, que nécessiterait l’élargissement de l’Union.

Alors que la France et l’Allemagne ont déclaré que l’élargissement de l’UE devrait s’accompagner de réformes internes majeures, il n’est pas certain que les revues de politiques publiques commandées par von der Leyen abordent ce sujet délicat. Il est donc prudent de remettre cette question à plus tard.

— Par Nick Vinocur