IA et télécoms : it’s a match!

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Par ÉMILE MARZOLF

Avec OCÉANE HERRERO et KLARA DURAND

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AU MENU

— Le deal gagnant-gagnant des opérateurs télécoms avec des IA génératives.

— Les datacenters ont les yeux plus gros que le ventre, selon RTE.

— Protection des données : la CNIL se rode face aux modèles d’IA, avec Mistral pour cas pratique.

Bonjour à toutes et à tous, nous sommes vendredi 14 février. Pour la Saint-Valentin, nous vous disons notre amour non pas avec des fleurs, mais avec notre classement annuel des 30 couples influents en France. Politiques, entrepreneurs, hauts-fonctionnaires, journalistes… ils sont à retrouver ici.

Divorce. C’est une petite annonce qui clôt des mois de panne : TikTok recherche un nouveau responsable des affaires publiques. L’entreprise s’est séparée d’Eric Garandeau, ancien titulaire de la fonction, à la suite d’une enquête du parquet national financier (PNF) pour favoritisme et détournement de fonds publics, a appris ma collègue Océane Herrero. Elle vous en dit plus dans cet article.

LE FAIT DU JOUR

AI < 3 TELECOMS. Au cas où vous l’auriez oublié : ce soir, c’est la Saint-Valentin. Je ne sais pas pour vous, mais côté opérateurs mobiles, tous ou presque ont trouvé leur partenaire. Profitant des projecteurs du Sommet sur l’IA à Paris, les annonces de fiançailles se sont enchaînées : Free et Orange ont dévoilé des partenariats avec Mistral, tandis que Bouygues Telecom s’est associée à l’américaine Perplexity. Objectif : fournir aux abonnés télécoms des accès pro aux services d’IA.

Produit d’appel, poudre aux yeux, ou les deux ? La hype autour des IA génératives est une occasion en or d’inclure un nouveau service dans leurs forfaits mobiles, à l’instar des accords conclus par le passé avec des plateformes de streaming vidéo ou musical. “La concurrence étant intense, en particulier en ce moment, il y a un enjeu à se différencier au-delà du prix”, analyse un expert du marché des télécoms.

Inclus dans l’abo. “C’est une manière puissante de présenter Perplexity, et de gagner du temps”, indique ainsi Dmitry Shevelenko, chief business officer de la start-up américaine, auprès de ma collègue Océane Herrero. Moins connu du grand public que son concurrent ChatGPT, Perplexity a fait de ces accords un des axes de sa stratégie à travers le monde. Des deals de ce type ont été signés en Allemagne (avec Deutsche Telekom) et au Japon (Softbank).

Plus franco-français, les accords signés par Free et Orange avec Mistral ont obtenu la bénédiction d’Emmanuel Macron, qui a salué mardi à Station F “la confiance qu’ont les grandes entreprises françaises — les Iliad, les Orange, les Thales, les Stellantis qui ont investi dans des partenariats” avec la start-up française. Celle-ci est en quête de notoriété auprès du grand public, comme l’a reconnu son patron Arthur Mensch dans nos colonnes

Une idylle, trois deals. Les trois partenariats ne sont pas identiques. Free va proposer un accès gratuit à Le Chat (le ChatGPT de Mistral) à tous ses abonnés. Bouygues fera de même avec Perplexity. Orange offrira un accès en option à la version premium du Chat et des outils supplémentaires pour ses abonnés “entreprise”. Le partenariat Orange/Mistral va aussi plus loin et envisage de faire de la R&D, ou encore de regarder comment intégrer l’IA dans la supervision des réseaux télécoms.

Il reste une catherinette : SFR. “Ce n’est pas notre priorité, d’autant que ces moteurs d’IA sont accessibles gratuitement par ailleurs”, justifie le communicant en chef de SFR, Nicolas Chatin. Son entreprise préfère utiliser l’IA en interne pour “améliorer la relation client par exemple”, et commencer par “sensibiliser [ses] salariés”. Mais, reconnaît-il, si tout le monde s’y met vraiment, l’opérateur au carré rouge sera bien obligé de s’aligner.

DATACENTERS

HYPERTENSION. Les datacenters font-ils vraiment peser un risque sur le réseau électrique français ? Son gestionnaire RTE, qui présentait hier son nouveau plan d’investissement, semble en douter. Certes, l’essor de ces centres de données représente “la principale source d’augmentation de consommation d’électricité dans le secteur tertiaire”, mais il n’en est pas moins incertain. Surtout, l’empilement des demandes de raccordement au réseau est en partie fictif.

En cause : l’appétit surestimé des industriels et des opérateurs de datacenters en particulier. “Moins de 15% des projets ont confirmé leur engagement et formellement demandé à déclencher les travaux sur le réseau”, pointe RTE. Autre raison : les porteurs de projets signent pour des puissances électriques qu’ils n’atteignent qu’au bout de plusieurs années, voire jamais, comme nous vous le racontions dans cet article.

Oui mais, vous répondront les acteurs de la filière : les délais de raccordement atteignent quand même des records, quelles que soient la nature et la qualité du projet. La faute à la politique du “premier arrivé, premier servi” au cœur de la mission de service public de RTE.

Appel à un AMI. Pour y remédier, le gestionnaire veut changer d’approche afin de pouvoir hiérarchiser les demandes et prioriser certains projets industriels. Il réfléchit notamment à lancer des appels à manifestation d’intérêt (AMI) dès 2025 pour “empêcher les phénomènes de spéculation”, c’est-à-dire la réservation de puissance électrique pour des projets fictifs ou irréalistes.

Autre piste : la création d’un ticket coupe-file, avec la mise en place d’une procédure à part pour le raccordement de sites à “très forte puissance”. Le patron de RTE, Xavier Piechaczyk, a d’ailleurs rappelé hier qu’il avait déjà fait des propositions de raccordements “ultrarapides” aux opérateurs de datacenters, “à condition qu’ils se connectent sur les bons nœuds de réseaux”. Le gestionnaire a proposé huit sites où la pleine puissance peut être atteinte en trois ans, sur les 35 identifiés par le gouvernement.

**Débrief | Sommet pour l’Action sur l’IA, et après ? Quelles perspectives en France et en Europe ? Après la tenue du Sommet pour l’Action sur l’IA, l’heure est au bilan. Compétitivité de l’UE, nouveaux programmes d’investissement, datacenters et transition écologique : les enjeux ont été multiples, les implications nombreuses, et beaucoup de questions restent en suspens. Pour vous aider à y voir plus clair, nos journalistes vous proposent un débrief spécial sur le Sommet, le mercredi 19 février à 14h. Réservez dès à présent votre place via ce lien.**

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

VENT CONTRAIRE. L’information a suffi à ternir la semaine dorée de Mistral AI. Un recours a été déposé par un avocat français auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), a révélé l’Informé. Le motif : l’entreprise d’IA ne permettrait pas aux utilisateurs qui utilisent la version gratuite de l’application d’utiliser leur droit d’“opt-out” — qui permet d’éviter que les questions posées à la solution d’IA, Le Chat, n’alimentent sa base de données d’entraînement.

Contactée par ma collègue Océane Herrero, la start-up veut dégonfler l’affaire. “Mistral AI a toujours permis à ses utilisateurs de refuser l’utilisation des informations contenues dans les requêtes adressées au Chat”, nous indique un porte-parole. “Nous avons récemment reformulé ce point dans nos conditions d’utilisation pour davantage de clarté”, précise-t-il encore. En l’occurrence, l’entreprise y a indiqué que les utilisateurs de la version gratuite du Chat doivent écrire un mail à Mistral pour exercer leur “opt-out”.

UN KAWA À LA CNIL. La CNIL va en tout cas examiner le dossier, a indiqué Félicien Vallet, chef du service IA, à Océane. “On connaît bien” Mistral, assure le responsable, qui parle de relations plutôt fluides avec la start-up et ne s’avance pas sur l’existence ou non d’une infraction. “Les comportements [des entreprises d’IA] sont divers, mais on observe que des choses ont évolué au cours du temps. ChatGPT a fonctionné comme ça” — c’est-à-dire en nourrissant sa base de données d’entraînement à partir des interactions avec l’IA. “Les situations ne sont pas nécessairement équivalentes, et c’est ce qu’il faut examiner.”

L’autorité, qui attend encore de savoir quel sera son rôle dans la mise en application du règlement pour l’intelligence artificielle (AI Act), voit les dossiers concernant l’IA se multiplier — elle a récemment lancé une analyse de l’outil chinois DeepSeek. “Selon les échos que l’on a” de la part des homologues européens de la CNIL, “ils répondent”, précise Félicien Vallet, qui s’interroge cependant sur le manque de coordination de la réponse européenne. La CNIL italienne a fait disparaître DeepSeek des magasins d’applications de la péninsule, tandis que leur homologue irlandaise a envoyé une demande d’information aux créateurs de l’appli. 

En Européens. “Pour être plus efficaces, il nous faut désormais avancer en bloc”, poursuit-il. “La situation était similaire avec le lancement de ChatGPT : nous avions créé une task force, et celle-ci va être pérennisée pour harmoniser nos façons de faire” au niveau européen, précise-t-il, en suggérant “un questionnaire” unique “pour éviter les actions trop éparpillées, moins efficaces et, il faut le reconnaître, complexes à gérer pour les acteurs privés”.

ÉDUCATION

IA ÉCOLE. Elisabeth Borne était interrogée hier par le sénateur socialiste David Ros sur les contours de son projet de formation à l’IA dans les lycées et collèges, et comment celle-ci garantira la protection des données des élèves.

La ministre de l’Education nationale a assuré que l’objectif était de mesurer “les biais que l’on peut avoir avec l’IA”. Sur la question des données, elle a aussi réitéré la promesse du développement d’une intelligence artificielle souveraine “pour accompagner la formation des enseignants à cette technologie”. Elisabeth Borne entend aussi déployer des outils de formation en ligne pour les professionnels sur le site de l’Education nationale.

Retours sans détours. Pour ce faire, le ministère poursuit sa consultation qui doit donner lieu à la publication d’une charte au printemps. “Au niveau national, une dizaine d’ateliers sont organisés avec des professeurs, des personnels de direction, des parents d’élèves, des lycéens et de leurs organisations représentatives dont les retours sont collectés”, précise le cabinet d’Elisabeth Borne à ma collègue Klara Durand. A cela s’ajoutent des contributions écrites, notamment via la CREIA — pour Communauté de réflexion des pratiques de l’IA en éducation — qui réunit 3 000 enseignants.

AGENDA

A 10 heures, la ministre du Numérique Clara Chappaz profite de son excursion à Cannes pour rencontrer son homologue de la Principauté de Monaco, Frédéric Genta.

A 10h30, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher se rend dans le Var pour parler IA et économie maritime (blue economy, pour les intimes).

RESTEZ BRANCHÉS

— Amazon peut continuer de livrer des livres gratuitement, mais pas dans des “lockers”, rapporte le site Actualitté.

— Le Quai d’Orsay va déjà refondre son dispositif de lutte contre la désinformation, indique La Lettre.

— Next revient sur l’étonnant partenariat entre AMD et l’émiratie G42 pour construire un datacenter à Grenoble.

Un grand merci à : notre éditrice Tiphaine Saliou et Jean-Christophe Catalon.

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